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La liberté dans le coma (1)

A lire d'urgence.

41JfTTu1U4L._.jpgLa liberté dans le coma est un livre du groupe Marcuse, qui s'interroge sur les conséquences de l'informatisation du monde et de la traçabilité systématique de nos faits et gestes et réfléchit aux moyens de s'opposer au fichage généralisé.

Comment en est-on arrivé là ? Quelles forces économiques, politiques et techniques se sont conjuguées pour produire cette traçabilité quasi intégrale des humains et de leur activité ?

"Il y a plusieurs fils à tirer à la fois pour comprendre :
- il s’agit de la course au profit (par la suppression du travail humain, par les techniques de marketing, par l’invention de nouvelles marchandises informatiques),
- de projet politique d’idéologie gestionnaire,
- de passion scientifique pour la maîtrise du réel, sa formalisation, sa mise en chiffre.
Passion qui n’a sans aucun doute pas seulement prit sa source dans des désirs de domination sociale mais aussi dans des rêves d’efficacité productive, d’abondance programmée et parfois partagée, de communication universelle et de liberté absolue".

Le groupe Marcuse explique que le fichage massif et systématique répond a une tendance normale de la société industrielle capitaliste, c’est une tendance profonde de notre civilisation d’accumuler des informations dans les institutions du pouvoir public comme du privé.

La production et la consommation de masse a produit une immense bureaucratisation: 


- Dans la sphère de production plus que jamais le travail est parcellisé et contrôlable: tous les actes des uns et des autres, tous les produits sont fichés, leurs flux tracés, les actions disséquées. La hiérarchie accumule les éléments sur ce qui marche bien ou moins bien, sur la vitesse et l’efficacité des personnes et des processus. C’est une volonté de rationalisation qui permet d’avoir des statistiques, des éléments sur la productivité, des bulletins de salaire, une comptabilité… 


L’ordinateur semblait autoriser une organisation moins bureaucratique, qui serait plus performante dans un monde de concurrence et d’abondance, et plus épanouissante pour des salariés plus instruits qu’autrefois.

L’informatisation s’est finalement révélée un nouveau stade de la bureaucratie de l’entreprise.


- Dans la sphère de la consommation : les entreprises produisent des quantités telle, qu’elles ne peuvent pas connaître leurs clients. C’est la raison d'être du marketing qui étudie la clientèle pour ajuster la communication et la production. Elle aboutit à la segmentation de la consommation et donc à une surveillance des consommateurs de plus en plus précise. 

Tout cela est le fonctionnement normal d’une société industrielle de masse où tout est organisé à des échelles démesurées, ce qui implique de produire des quantités énormes de produits qu’il est nécessaire de faire consommer aux gens pour que l’économie ne s’écroule pas.



Le fichage des personnes est aussi le fait des Etats-Nation, parfois pour des raisons propre aux Etats-providence. Par exemple, les premières utilisations des machines à cartes perforées ont servi à recenser la population américaine pour faire fonctionner le système électoral dans chaque Etat.

Les buts ne sont pas tous tyranniques, il y a autant de «providence » que de surveillance dans les excès du fichage.

C’est une culture de la bureaucratie et de la trace où le fichage permanent des personnes et de tout l'environnement (biométrie, codes barre, pucages dans l’élevage, stockage des informations personnelles…) nous semble normale et acceptable.
La biométrie permet d’automatiser la reconnaissance des individus en s’appuyant sur leur anatomie. Elle traduit notre image en chiffre, elle extrait le corps de sa dimension sociale, relationnelle, pour en faire un élément sériel désincarné. Aussi Exige-t-on dorénavant des photographies d’identité sans accessoires ni sourire, de façon à faciliter la lecture numérique des traits du visage.

L’identification électronique est un aboutissement de la civilisation bureaucratique.




La traçabilité généralisée nous rend dépendants moralement de cette société dont nous sommes déjà dépendants matériellement. Le fait de savoir que tout peut être su de nos faits et gestes n’induit-il pas une perte d’intégrité de l’individu, une soumission inconsciente à l’infrastructure technologique qui incarne la collectivité de nos jours?

Notre cri du cœur pourrait donc devenir :
"ni à prélever, ni à revendre : nous ne sommes pas des informations! »




Ecouter Mathieu Amiech co-auteur sur France culture

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