La narrative, compagnon de route dans la mutation.
Ce n’est sûrement pas un hasard si l’approche narrative est née dans les années 70 et trouve un écho dans le monde maintenant, elle répond à nos enjeux sociétaux en proposant, non plus une philosophie de la santé , mais une philosophie du devenir.
La finalité de l’approche narrative est de redevenir auteur de sa vie, c’est un accompagnement de la liberté. Cette liberté pend racine dans le réel et les traditions.
C’est bien l’enjeu qui est posé à l’humanité dans cet entre-deux. Celui de notre devenir. Dans cette révolution de l’être et de l’esprit, chacun est responsable de son accomplissement.
La PN a bien compris l’importance du paysage de l’action, l’homme est ce qu’il fait, dans une logique du devenir guidé par le paysage de l’identité.
En s’appuyant sur ce que les personnes aiment et savent faire, en honorant les réussites et les ressources, elle parie sur le talent de chacun. Dans cet entre-deux, il n’est plus temps de soigner les névroses pour se conformer, il s’agit de sortir de l’esclavage et consacrer son énergie à l’histoire préférée qui est celle de la liberté de notre accomplissement.
L’approche narrative avec sa philosophie de la résistance (Vietnam, féminisme..) et de l’accueil de la diversité des anthropologies (aborigènes…), développe l’idée d’une histoire dominante qui peut être déconstruite si nécessaire. Aujourd’hui, c’est le moment de le faire pour ne pas sombrer dans le chaos et la désespérance et donner une chance à des histoires alternatives collectives d’exister. La Pratique Narrative encourage les histoires alternatives, qui ne sont pas des histoires d’obéissance et de conformité comme dans d’autres approches d’accompagnement. En posant que l’essence du pouvoir c’est se donner le droit de définir l’autre et toucher les droits d’auteur, elle permet de questionner sous un angle inédit notre relation avec l’Etat, le salariat, la société de consommation productiviste etc.
La Pratique Narrative peut accueillir plusieurs histoires alternatives sans perdre ses repères et soutient la diversité dans la vie de tous les jours. Dans le monde entier, les narrapeuthes soutiennent les communautés dans une réappropriation de leur identité et de leur autonomie. Içi, le collectif n’est plus monolithique et c’est profondément en accord avec la réalité de notre société en mutation autour de communautés réelles ou virtuelles en mouvement et en réseau.
Changer notre modèle dominant de pensée.
Dans la complexité, les outils de compréhension actuels , notamment ceux de la sciences ne fonctionnent plus. Avec la modernité se meurt la pensée classique et sa vison cartésienne et matérialiste du monde. Le temps est arrivé de sortir du rationalisme, de l’analytique, du mécanisme et du déterminisme (cycles, lois physiologiques, profil, personnalités, DSM 4…). L’approche narrative s’inscrit dans une pensée de la complexité, holistique et systémique, où le tout est plus que la somme de ses parties. Le narrapeuthe ne voit pas une personne isolée qu’il convient d’analyser en la réduisant à une profil ou une pathologie, il la voit comme une personne interconnectée avec ses appartenances culturelles , communautaires , familiales, reliée au passé et à l’avenir. En sortant de l’histoire dominante qui raconte que la science peut comprendre, diagnostiquer et expliquer nos êtres et notre pensée, la pratique narrative propose une porte de sortie à la vision mécaniste et déterministe que nous modélise la psychologie classique. Plus besoin d’inconscient dans une pensée holistique où nous sommes une partie du Tout, il n’y a pas de face cachée de nous-même. Nous sommes mouvement, nous sommes narration. La vision narrative en résonance avec la complexité de la vie accueille une identité plurielle et en changement perpétuel comme un projet social en renégociation permanente. Loin du rationalisme, la PN accueille le visible et l’invisible et la richesse de toutes les cultures. La PN, propose de retisser des liens entre les histoires de la personne (histoires physique, biologique, psychique, culturelle, sociale, historique). Chacun peut ainsi prendre davantage conscience de son identité complexe et de son identité commune avec tous les autres humains.
Découvrir ou aller plus loin vers la Pratique Narrative.
Commentaires
Bonjour Natacha,
J'ai eu plaisir, encore, à lire cet article et le thème.
La seule remarque que je ferais c'est le paradoxe de formaliser, à l'image des modèles cités, la Pratique Narrative. Les thérapies humanistes, intégratives, transpersonnelles etc ... ont dans leurs pratiques et fondamentaux des démarches identiques.
Des points communs les lient.
Chaque modèle se construit comme étant une sorte de zoom sur un aspect et c'est ce qui me gène. Nous avons cette fâcheuse tendance à théoriser ou écrire un livre sur notre pratique (souvent cela a déjà été fait) comme pour lui donner une valeur universelle au lieu de continuer simplement à cultiver sont jardin (l'être dans l'action).
Suspendre pour un temps les théories ferait du bien pour que chacun apprenne à penser et à agir par lui-même et devenir ce qu'il voudrait que le monde soit. Et non, vouloir transmettre, former, conseiller sur ce que l'on n'est pas encore soi-même.
Merci Julia, tu as raison, le simple fait de décrire une approche est déjà une formalisation qui nous enferme. c'est sans doute en racontant des histoires (c'est comme cela que Michaël White et les fondateurs nous initient à la Pratique Narrative dans leurs livres et formations) que nous dénaturons le moins ce partage d'experience car il s'agit alors non pas de techniques ou de théories mais de la magie d'une rencontre entre deux ou plusieurs individus libres et créatifs pour leurs propres vies.
Je suis bien d'accord sur l'idée de suspendre les théories et que chacun se concentre sur son devenir, ce qui est notre Oeuvre.